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Les oreilles des enfants de moins de 10 ans seraient gravement menacées de surdités précoces

Actualités

24.03.23

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L'enquête annuelle IFOP-JNA 2023 sur la santé auditive des enfants révèle des signes alarmants

« Environ 1,3 millions d’enfants de moins de 10 ans ont déjà consulté un médecin ORL pour des acouphènes selon leurs parents et pour près de 660 000 enfants, une perte auditive moyenne à sévère a été diagnostiquée ». Une nouvelle enquête de l’Association JNA réalisée avec l’institut Ifop donne une photographie alarmante de la santé auditive des moins de 10 ans. Ce premier baromètre réalisé sur un panel représentatif de parents ayant au moins un enfant de moins de 10 ans est inédit en France et constitue une base de référence. « On savait que jusqu’à l’âge de 10 ans l’oreille des enfants est beaucoup plus fragile que celle des adultes. Alertée par les médecins et les acteurs de la prévention et de la santé sur les dangers du bruit chez les enfants, notre association a réalisé cette enquête auprès des parents : le résultat est terrifiant. Les oreilles de nos enfants sont en danger ! L’audition est le socle du développement du langage, de la socialisation et des apprentissages. Nous espérons que les pouvoirs publics, et notamment le Ministre de la Santé et de la Prévention en prendra pleinement conscience. » indique le Pr. Jean-Luc Puel, président de l’Association JNA. Chiffres à l’appui.

Analyse complète

Les parents d’enfants de moins de 10 ans souffrent globalement d’un déficit d’informations sur les enjeux liés à l’audition de leur enfant par rapport à d’autres enjeux

Interrogés sur leur niveau d’information concernant différents enjeux de santé pour leur enfant, la surdité et les acouphènes arrivent ainsi en bas de du classement, un peu moins d’un parent sur deux (49%) s’estimant bien informés sur le sujet, méconnu dans les mêmes proportions que l’autisme. A l’inverse, le Covid 19 (84%), l’addiction aux écrans (79%) et l’obésité (74%) sont les enjeux de santé les mieux appréhendés par les parents selon leurs dires. A noter, les parents d’enfants de 5 à 9 ans s’estiment systématiquement mieux informés que ceux d’enfants de moins de 5 ans, les connaissances générales liées à la santé de l’enfant semblant donc s’affiner à mesure que celui-ci grandit.

De façon plus précise, moins du tiers des parents (29%) affirme connaitre les dispositifs liés aux troublesauditifs s’appliquant aux enfants et mis en place par les pouvoirs publics, dont seulement 9% « très bien » contre 28% « très mal ». Parmi les mieux informés sur le sujet figurent les pères (31%, +4pts vs les mères), les jeunes parents de 18 à 24 ans (39%, +23pts vs les 50 ans et plus), les parents d’enfants de 5 ans et plus (33%, +8pts vs ceux de moins de 5 ans), ceux qui ont trois enfants ou plus de moins de 10 ans dans leur foyer (39%, +11pts vs enfant unique), et les parents résidant en agglomération parisienne (34%, +8pts vs les communes rurales). Les ouvriers affirment également davantage cerner ces dispositifs que les cadres (38% pour les premiers vs 21% pour les seconds), étant eux-mêmes plus soumis au bruit et aux nuisances sonores dans le cadre de leur travail et cherchant peut-être davantage à en préserver leur enfant. 

Les parents sont moins soucieux des risques de surdités et d’acouphènes pour leur enfant que d’autres enjeux plus présents dans l’actualité…

Ils sont ainsi 32% à indiquer être inquiets pour leur enfant concernant les enjeux de surdité et d’acouphènes, un score qui s’inscrit dans les mêmes proportions que les craintes liées à l’obésité et au Covid 19, signe que les parents identifient peut-être ces enjeux comme étant plus lointains et pouvant être plus facilement anticipés. Dans le trio des enjeux les plus redoutés par les parents se trouvent en parallèle des problématiques aux impacts bien plus médiatisés : le harcèlement numérique ou scolaire (63%), les impacts environnementaux (61%) et l’addiction aux écrans (58%).

… Mais ils se considèrent tout de même responsables en la matière et adaptent leur comportement en conséquence

La majorité des parents (70%) se déclarent capables de reconnaitre une difficulté de compréhension de la parole chez leur enfant, un score proportionnel à l’âge de l’enfant : les parents d’enfant de moins 5 ans sont ainsi 63% à s’estimer compétents, contre 78% des parents d’enfant de 5 ans et plus (âge auquel l’enfant est plus apte à exprimer ce qu’il ressent et à se faire comprendre). On observe de nouveau une confiance plus forte des ouvriers à identifier ces problèmes (76% vs 63% des cadres).

Les parents reconnaissent par ailleurs les répercussions négatives du bruit sur différents aspects de la vie de leur enfant : sa fatigue (pour 55% d’entre eux), son sommeil (47%), sa nervosité et son agressivité avec les autres (44%) et son niveau de stress (43%), son apprentissage des leçons (44%) ou encore son utilisation des écrans (42%). Malgré tout, ils identifient moins clairement l’impact des nuisances sonores sur l’audition de leur enfant en tant que telle. Ils sont ainsi moins de 4 sur 10 à estimer qu’elles peuvent générer une gêne de compréhension de la parole chez leur enfant (37%), une surdité (33%) ou encore des acouphènes (31%).

Interrogés sur le fait d’adapter le volume sonore dans différents lieux en présence de leur enfant, les parents sont majoritaires à répondre le faire, que ce soit dans leur foyer (76%, dont 36% « souvent »), dans leur voiture (72%, dont 33% « souvent ») ou encore lors de réception à leur domicile (60%, dont 24% « souvent »). C’est particulièrement le cas des plus jeunes parents de 18 à 24 ans, des habitants d’Ile-de-France, et des personnes aux plus hauts revenus.

La grande majorité des parents déclarent que leur enfant a déjà bénéficié d’un dépistage de l’audition par un professionnel de santé, surtout pratiqué par le médecin généraliste ou le pédiatre

Pour 84% d’entre eux, leur enfant de moins de 10 ans a déjà fait l’expérience d’un dépistage de l’audition par un professionnel de santé, les deux acteurs les plus sollicités pour ce test étant le médecin généraliste et le médecin pédiatre, tous deux l’ayant pratiqué dans 46% des cas. Le premier est davantage consulté pour les enfants de 5 ans et plus (53%), par les ouvriers (52%), par les habitants de province (47%) et par les catégories pauvres (50%), là où le second est davantage l’apanage des jeunes parents de moins de 35 ans (51%), ayant des enfants de moins de 5 ans (50%), des Franciliens (51%), et des catégories aisées (50%).

Dans une moindre mesure, un tiers des parents se sont tournés vers un médecin ORL (33%) et d’autres acteurs ont réalisé ce dépistage sans passer par leur intervention : la médecine scolaire (dans 35% des cas) et le médecin de la PMI (service de protection maternelle et infantile (dans 25% des cas). Ce dernier acteur est particulièrement intervenu auprès des jeunes parents de 18 à 24 ans (31%), des ouvriers (33%), des Franciliens (34%) et des catégories pauvres (31%).

Un peu plus d’un parent sur deux a déjà consulté au moins une fois un médecin ORL pour son enfant, et ce pour différents motifs impactant l’audition à plus ou moins long terme

55% des parents ont déjà conduit leur enfant de moins de 10 ans chez un médecin ORL. C’est particulièrement le cas des pères (59%, +7pts vs les mères), des parents d’enfants de 5 ans et plus (64%, +18pts vs les parents d’enfants de moins de 5 ans), des ouvriers (59%, +7pts vs les cadres), des habitants de l’agglomération parisienne (67%, +16pts vs les communes rurales), et des parents de plusieurs enfants de moins de 10 ans (63%, +11pts vs enfant unique). Les parents se tournent donc plus naturellement vers un médecin ORL dans les grandes villes, où ceux-ci sont davantage présents et accessibles, et lorsqu’ils ont plusieurs enfants qui ont potentiellement déjà expérimenté eux-mêmes des troubles auditifs.

Parmi les principaux motifs de consultation figurent en premier lieu l’otite (41% des parents ont consulté un médecin ORL pour cette raison), puis des douleurs à l’oreille (31%) et des bouchons de cérumen (23%). Les motifs plus alarmants ayant trait à l’audition de l’enfant à plus long terme sont relevés par un peu moins d’un parent sur cinq : des difficultés de compréhension de la parole (18%) et des sifflements ou bourdonnements dans les oreilles, autrement dit des acouphènes (14%). Parmi les quelques 9,5 millions enfants de moins de 10 ans en France, environ 1,3 millions auraient donc potentiellement consulté un médecin ORL en raison d’acouphènes1. Ce problème de santé concerne surtout les enfants de 5 ans et plus (18%), les enfants d’ouvriers (19%), les Franciliens (23%) et les enfants utilisant quotidiennement un casque ou des écouteurs (28%).

Les problèmes auditifs justifiant la consultation d’un ORL sont surtout soulevés par l’entourage proche ou par un professionnel de santé, et l’enfant joue un rôle prépondérant dans la détection

La majorité des parents ayant consulté un ORL pour leur enfant ont été alertés directement par celui-ci (56%), et environ quatre sur dix par un professionnel de santé (41%) ou par leur conjoint(e) (40%). A noter, si les pères s’estiment globalement plus informés sur les enjeux d’audition que les mères, ils sont aussi bien plus nombreux à indiquer avoir été mis dans la confidence des problèmes auditifs de leur enfant par leur conjointe (52%, +23pts vs les mères).

Dans une moindre mesure, moins d’un parent sur quatre a été alerté par une personne de son entourage familial ou amical (23%), par l’enseignant de leur enfant (19%) ou encore par une personne le gardant ou par le personnel de la crèche (18%).

L’enfant constitue donc le principal vecteur pour exprimer ses problèmes auditifs, et environ un tiers de l’ensemble des parents (30%) affirme que leur enfant se plaint du bruit et des nuisances sonores, un chiffre qui augmente avec l’âge de l’enfant : 23% pour les enfants de moins de 5 ans et 38% pour les enfants de 5 à 9 ans. Se pose donc la question de l’expression de la gêne auditive des enfants plus jeunes, qui ne sont pas forcément en capacité de parler ou d’identifier ce qu’ils ressentent.

A l’issue de la consultation avec le médecin ORL, une perte auditive a été diagnostiquée dans un peu moins d’un cas sur deux, ce qui représente au total un parent sur quatre concerné par ce problème

44% des parents ayant conduit leur enfant chez l’ORL ont vu poser le diagnostic d’une perte auditive, dont 32% légère, 10% moyenne, ne nécessitant pas appareillage, et 2% sévère, nécessitant un appareillage. Ramené à l’ensemble des enfants de moins de 10 ans, une perte auditive a été diagnostiquée par un médecin ORL pour un quart d’entre eux (25%), et moyenne à sévère pour 7%. Environ 660 000 enfants de moins de 10 ans seraient donc concernés en France, un chiffre probablement sous-estimé, car il ne prend en compte que ceux ayant été diagnostiqués, et par un médecin ORL2.

Une perte auditive moyenne à sévère est davantage diagnostiquée auprès des enfants de 5 ans et plus (8%, +3pts vs les enfants de moins de 5 ans), des enfants ayant au moins deux frères et soeurs (10%, +4pts vs enfant unique), et des Franciliens (10%, +4pts vs la province).

L’utilisation du casque constitue une circonstance aggravante dans les problèmes auditifs des enfants relatés par leurs parents

40% des parents estiment que leur enfant de moins de 10 ans écoute quotidiennement des sons via un casque ou des écouteurs, 21% moins d’une heure par jour, 13% entre une à deux heures, et 6% plus de deux heures. Or les parents dont l’enfant est concerné mentionnent bien plus les plaintes de celui-ci à l’égard du bruit et des nuisances sonores (47%, +28pts vs les autres enfants) et le diagnostic d’une perte auditive moyenne à sévère (14%, +12ps vs les autres enfants).

Les familles monoparentales attestent davantage de problèmes auditifs chez leur enfant et sont plus au fait des dispositifs mis en place par les pouvoirs publics en la matière

Les parents élevant leur enfant dans un foyer monoparental sont bien plus nombreux à indiquer que celui-ci se plaint du bruit et des nuisances sonores : ils sont ainsi 44%, contre 28% dans les foyers avec deux parents. De plus, 57% témoignent de l’utilisation de casque ou d’écouteurs chez leur enfant, contre 38% dans les foyers avec deux parents. Conséquence entre autres de cet usage poussé du casque ou des écouteurs, les parents dans un foyer monoparental sont surreprésentés à avoir consulté un médecin ORL pour leur enfant. C’est le cas pour 66% d’entre eux (contre 54% dans les foyers avec deux parents), et une perte auditive a été diagnostiquée dans 40% des cas au total, moyenne à sévère dans 20% des cas (contre respectivement 22% et 5% dans les foyers avec deux parents).

Ayant des enfants plus concernés par les problèmes auditifs, les parents seuls connaissent mieux les dispositifs de vigilance mis en place par les pouvoirs publics (39% affirment les connaitre, contre 26% dans les foyers avec deux parents).

Face à cette situation, les parents attendent l’intervention de l’Etat dans la protection des oreilles de leur enfant, à travers avant tout des campagnes d’incitation au dépistage

Trois quarts d’entre eux (76%) estiment que les pouvoirs publics devraient faire de l’audition de l’enfant une grande cause nationale de santé publique, dont 18% « tout à fait ». Dans le détail, ils souhaitent avant tout mettre en place des campagnes d’incitation au dépistage des troubles auditifs (sur le même modèle que celles liées à la santé dentaire ou visuelle) : cette mesure est préconisée par 41% des parents, loin devant la mise en place d’une vigilance renforcée auprès de différents acteurs dans le milieu médical ou éducatif (20%), des campagnes d’information régulière sur le sujet (15%) ou encore un plan d’action permettant une meilleure inclusion des enfants malentendants.

Les parents attendent donc davantage d’actions concrètes a posteriori (à travers des dépistages plus systématiques) que des actions de prévention en amont, comme si quelque part les problèmes auditifs ne pouvaient être traités qu’une fois détectés, et non empêchés à la racine.

1 Ce chiffre est basé sur les données déclaratives de l’enquête ; lorsque les parents interrogés avaient plusieurs enfants de moins de 10 dans leur foyer, ils devaient se prononcer sur leur dernier enfant âgé de moins de 10 ans. Le résultat est donc potentiellement sous-estimé.
2 Ce chiffre est basé sur les données déclaratives de l’enquête ; lorsque les parents interrogés avaient plusieurs enfants de moins de 10 dans leur foyer, ils devaient se prononcer sur leur dernier enfant âgé de moins de 10 ans. Le résultat est donc potentiellement sous-estimé.

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