fermer
revenir au site   >

Rapport des trois Hauts Conseils et 100 % santé en audiologie : veillons à ne pas dégrader une réussite française

Actualités

03.07.25

image bannière

Face à certaines recommandations récentes visant à diminuer le coût des soins auditifs, le Syndicat des audioprothésistes (SDA) rappelle l’impact positif avéré de la réforme du 100 % santé, qui a permis d’améliorer significativement le taux d’équipement des Français et contribué à la prévention du déclin cognitif et de la perte d’autonomie.

Le SDA met en garde contre toute mesure fondée sur des données non actualisées, susceptible de fragiliser l’accès à l’équipement auditif, alors même que les retombées médico-économiques de la prise en charge de la perte auditive sont parmi les plus élevées du champ de la santé publique. Le SDA réaffirme sa disponibilité pour construire, avec l’Assurance maladie et le Gouvernement, des solutions garantissant à la fois soutenabilité financière, qualité des soins et équité territoriale.

Alors que nos comptes sociaux présentent des déficits records mettant en péril notre modèle social, deux documents récents proposent des pistes de réforme pour un retour à l’équilibre : le rapport « Charges et produits » de l’Assurance maladie et le rapport issu de la saisine conjointe par le Premier ministre de trois Hauts Conseils, le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM), le Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS) et le Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge (HCFEA).

Pour ce qui est de l’audioprothèse, le rapport des trois Hauts Conseils confirme le succès de la réforme du 100 % santé : « elle a amélioré le recours aux soins. Le nombre de personnes ayant été équipées d’aides auditives par an a fortement augmenté (+ 75 % entre 2019 et 2021), permettant de contribuer à la prévention, notamment du risque de démence et de déclin cognitif pour les personnes âgées ». Cela est d’autant plus méritoire que, jusqu’à la réforme, il n’existait aucun prix limite de vente (PLV) et qu’à présent environ 40 % des usagers sont appareillés avec des aides auditives sans reste-àcharge, avec un prix moyen en baisse d’environ 15 %. À l’origine des propositions ayant permis l’adoption de la réforme1, le Syndicat des audioprothésistes (SDA) maintient son engagement en soumettant de nouvelles mesures permettant de maximiser les gains économiques et sociaux permis par le 100 % santé audiologie.

Les trois Hauts Conseils envisagent des mesures permettant de modérer le coût des prises en charge du panier 100 % santé. Le recours accru à ces prestations a entraîné une forte augmentation des dépenses d’optique, de dentaire et d’audioprothèse. Néanmoins, les trois secteurs ont des poids relatifs très hétérogènes puisque les soins dentaires et l'optique représentent respectivement 22 % et 17 % des dépenses des complémentaires en 2023, contre seulement 3% pour l’audioprothèse2.

Afin de réduire le coût de l’audioprothèse, les trois Hauts Conseils proposent ainsi d’activer la clause permettant de diminuer le PLV du panier 100 % santé des audioprothèses. Il faut ici rappeler que c’est le choc d’inflation en 2022-2023, d’ailleurs souligné dans le diagnostic du rapport, qui a amené l’Assurance maladie à ouvrir en 2023 des négociations conventionnelles « flash » avec plusieurs professions paramédicales libérales afin d’en revaloriser les honoraires et, dans le secteur de l’audioprothèse, à ne pas appliquer la réduction du PLV du panier 100 % santé prévue en cas de dépassement de volume. Cette baisse non appliquée, d’environ 5 %, n’a, de fait, que très partiellement compensé les 18 % d’inflation constatés entre 2018 et 2025. Appliquer aujourd’hui cette baisse du PLV serait particulièrement pénalisant pour les professionnels, installés dans des quartiers peu favorisés, qui ont un taux important de patients choisissant le panier 100 % santé. Le SDA considère la mesure injuste au vu des efforts réalisés par la profession depuis la mise en place de la réforme et de ses excellents résultats.

Les trois Hauts Conseils procèdent aussi à des comparaisons de prix entre le 100 % santé, délivré en France par le secteur privé, avec les systèmes publics anglais et suédois. Pourtant l’IRDES3 indique « qu’en Suède et en Angleterre, le secteur public assure un achat centralisé par un système d’appel d'offre (…) mais cette solvabilisation se fait au prix d’une offre réduite et de phénomènes de files d’attente (...) : 12 mois en Angleterre ; entre 3 et 24 mois en Suède » avec une « offre limitée d’aides auditives ». L’IRDES note également que « dans ces deux pays, un canal d’approvisionnement par le marché privé tend à se développer depuis plusieurs années, qui attire une clientèle plus aisée financièrement, séduite par une offre beaucoup plus large que dans le secteur public, et par le fait d’éviter les files d’attente importantes dans les centres ». Ces atteintes majeures en termes d’accès aux soins et d’accroissement des inégalités sociales de santé ont des répercussions qui viennent d’être mises en évidence par les études EuroTrak publiées récemment. En effet, pour la première fois le Royaume-Uni voit son taux d’équipement baisser à 50,5 %, contre 52,8 % en 2022, alors que, sur la même période, la France connaît une nette progression du taux d’équipement : 55,5 % des personnes malentendantes sont équipées d’aides auditives, soit + 9,8 % par rapport à 2022. La France rejoint ainsi les meilleurs taux d’équipement auditif d’Europe4. Le système anglais, écartelé entre un modèle public notoirement sous-financé, et un marché privé environ 50 % plus cher que le nôtre pour les aides auditives de gamme moyenne et supérieure, est un parfait anti-modèle. Alors que la réforme du 100 % santé en audiologie assure un accès à des soins de qualité pour tous, son succès est d’autant plus remarquable que le taux de satisfaction globale est de 83%, se classant ainsi parmi les plus élevés d’Europe.

Pour ce qui est du rapport « Charges et produits » de l’Assurance maladie, il y est fait un focus sur les professions de santé financiarisées à forte rentabilité. Si le SDA confirme que la profession d’audioprothésiste est financiarisée à environ 40 %, il estime fragile le classement de notre secteur parmi ceux dits « à rentes économiques ». Si nous partageons l’inquiétude concernant les risques de financiarisation, de pression productiviste sur les jeunes diplômés et de concentration des centres, nous considérons que le ratio d’EBE/CA de 15,8 % en 2022 reflète une situation exceptionnelle liée à la montée en charge du dispositif 100 % Santé (+70 % d’activité). Ce chiffre surestime la performance car il ne prend pas en compte les investissements en personnel réalisés sur les exercices suivants afin d’assurer le suivi des nombreux nouveaux patients. Les difficultés économiques constatées en 2024 par de nombreux acteurs confirment que les conditions sont désormais très différentes. De ce fait, le SDA appelle à établir des données actualisées sur l’audioprothèse, notamment sur 2024, avant de proposer toute réforme. Une décision hâtive risquerait d’affaiblir les structures indépendantes au seul profit de grands groupes disposant d’économies d’échelle possibles.

Enfin, le SDA a montré la voie dans la lutte contre la fraude5 et considère que les premières économies doivent provenir de la poursuite résolue de cette lutte par les caisses d’assurance maladie. Le SDA estime que les correctifs devraient viser à améliorer la qualité et l’effectivité des prestations des audioprothésistes : la régulation de la publicité (point partagé par les trois Hauts Conseils et par l’Assurance maladie), le conventionnement direct entre l'assurance maladie et l'audioprothésiste qui exécute l'appareillage (le rapport « Charges et produits » évoque un renforcement des conditions de conventionnement avec les personnes morales), la création d’un Ordre, une régulation de l’installation...

Du fait des rendements sur investissement exceptionnels de la compensation du déficit auditif mis en évidence par les évaluations médico-économiques (de l’ordre de ceux de la vaccination), toute baisse tarifaire qui pénaliserait l’observance et/ou le taux d’équipement aurait un coût disproportionné par rapport à l’économie de court terme réalisée et irait à l’encontre des politiques de prévention, du « bien vieillir », un des rares leviers face au choc démographique à venir. Toute personne malentendante, non ou mal équipée, a un risque augmenté de souffrance au travail, d’isolement social, de troubles mentaux, de dépression, de chutes, de déclin cognitif, de perte d’autonomie…

Le SDA réaffirme sa disponibilité pour construire, avec l’Assurance maladie et le Gouvernement, des solutions garantissant à la fois soutenabilité financière, qualité des soins et équité territoriale.


À propos du SDA Le Syndicat des audioprothésistes (SDA ex-UNSAF) est l’organisme professionnel représentatif des 5 100 audioprothésistes de France. Il siège à l'Union nationale des professionnels de santé (UNPS), l'Union Nationale des Professions Libérales (UNAPL) et au Haut Conseil des professions paramédicales (HCPP). Il est le signataire de la convention nationale de tiers-payant et de l’accord cadre interprofessionnel (ACIP), conclus avec les Caisses nationales d'assurance maladie. Le SDA est aussi membre du World Hearing Forum de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Il est présidé par Brice Jantzem depuis septembre 2022. Centrales et enseignes partenaires du SDA : Audio Libre, Audition Conseil, Centrale des Audioprothésistes CDA, Dyapason, Entendre, Saga.